NICOLE CALUWE
Nicole Caluwé, première substitute du procureur du Roi d’Anvers
Magistrate dirigeante du parquet de la jeunesse d’Anvers
P. 174
Mme Nicole CALUWE fait remarquer qu’en tant que magistrate du parquet de la jeunesse d’Anvers, elle est souvent confrontée à la problématique du droit aux relations personnelles entre les enfants et leurs parents. Au tribunal de première instance, un avis est donné sur tous les dossiers traités lors des audiences en référé pour des mesures urgentes et provisoires dans le cadre d’un divorce. La procédure en référé a également une compétence générale si l’extrême urgence est prouvée.
En pratique, l’on constate que certains parents qui ne sont pas mariés ou qui sont déjà séparés recourent à une procédure en référé en invoquant l’extrême urgence. Dans le cadre de ces procédures, un avis est également donné. ….
L’intérêt de l’enfant est au centre de tous les avis.
Enfin, ces instances traitent toutes les plaintes des parents en matière d’abandon de famille et de non-respect du droit aux relations personnelles.
La problématique du divorce conflictuel
Sur la base de sa pratique quotidienne, elle peut confirmer qu’elle est de plus en plus confrontée à des enfants qui vivent très difficilement le divorce de leurs parents. Un certain nombre de modifications s’imposent donc assurément.
Propositions
— Divorce sans faute :
Il faut dissocier le plus possible le régime concernant les enfants et la faute éventuelle, de sorte qu’un divorce sans faute puisse profiter aux enfants. D’autre part, il ne faut pas en attendre monts et merveilles.
L’oratrice renvoie à ce propos aux nombreux dossiers dont est saisi le tribunal de la jeunesse dans le cadre de divorces par consentement mutuel.
Il arrive souvent que les parents s’adressent au juge de la jeunesse pour modifier un divorce par consentement mutuel d’à peine un an. Même s’il n’est bien entendu pas question ici d’un divorce pour cause de faute de l’un des parents, on peut malgré tout parler de divorce conflictuel.
La garde alternée comme norme légale
L’oratrice n’est pas partisane d’imposer la garde alternée au titre de norme légale, parce que cela n’est pas dans l’intérêt de l’enfant.
Chaque situation est différente et juge et parents doivent avoir l’occasion de rechercher pour chaque situation la solution de garde la meilleure possible, sans recourir à une norme légale.
Dans une situation où un parent a conscience que son ou sa partenaire peut consacrer davantage de temps aux enfants, il est dans l’intérêt des enfants qu’ils puissent passer davantage de temps chez ce parent, sans que l’autre ne soit pour autant taxé d’être un mauvais parent. Si la garde alternée devient la norme légale, il y aura toujours une bonne raison de ne pas pouvoir l’appliquer. Il s’ensuivra que l’autre parent se sentira un moins bon parent, ce qui n’est certainement pas dans l’intérêt de l’enfant. Elle craint qu’en imposant une nouvelle norme, on ne multiplie les conflits.
L’essentiel pour les enfants est l’absence de conflit entre leurs parents, pas le contact maximal avec leurs deux parents.
En même temps, les enfants sont extrêmement loyaux envers leurs parents.
S’ils demandent la garde alternée, c’est souvent dans le souci de ne porter préjudice à aucun des deux parents.
Elle entend par contre un très grand nombre d’enfants dire que la garde alternée est très lourde.
Des parents lui ont récemment confié qu’ils avaient temporairement choisi de laisser les enfants habiter le toit familial et eux-mêmes de déménager chaque semaine. Les deux parents ont cependant jugé ces déménagements hebdomadaires très éprouvants et aspiraient à un «chez soi».
Dans le cadre de la garde alternée, les enfants eux aussi souffrent souvent de cette absence de «chez soi».
Les enfants ont le droit d’avoir leur cercle d’amis, leurs loisirs, etc., ce que la garde alternée entrave parfois.